le blog des fanas de livres

24 mai 2023

Carnet de bord du 17 au 23 mai 2023

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Le soldat désaccordé de Gilles Marchand

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Acheté lors des Escales de Binic en mars, ce livre m'attendait sur ma PAL. Ayant vu qu'il avait reçu le prix des libraires, je l'ai ressorti, et bien m'en a pris.

Après la première guerre mondiale, un ancien poilu qui a perdu la main gauche, s'est spécialisé dans les investigations pour retrouver la trace de disparus. Il est contacté en 1925 par Jeanne Joplain qui est à la recherche de son fils. Celui-ci n'a plus donné signe de vie depuis 1916, suite à la bataille de Verdun. Persuadée qu'il est toujours vivant, peut-être amnésique, elle le mandate pour faire des recherches. Cette quête va lui prendre 16 ans et va devenir son leitmotiv.

Parce que ce Emile Joplain qu'il cherche avait quelque chose de spécial. Il était amoureux fou, transi d'amour, passionné et que, malgré l'horreur des tranchées, la violence des champs de bataille, les morts, les blessés, la boue, les poux et la vermine, Emile ne pensait qu'à Lucie et n'avait qu'un but, retrouver sa fiancée.

Lucie, l'alsacienne, qui faisait de même de son côté, allant jusqu'à arpenter les no man's land pour essayer de retrouver son prince.

Commence alors une quête qui va replonger notre enquêteur dans la guerre.  Il interroge des anciens soldats, des témoins qui, à force d'anecdotes, rendent le récit très vivant. L'ironie a aussi la part belle, entre les combats pour gagner quelques mètres  "On oubliait que ça allait repéter de partout, qu'on allait partir à cent et revenir à trente, qu'on allait tuer, qu'on allait mourir, qu'on allait laisser un ami dans le no man's land et l'entendre gémir la nuit entière." les réflexions simples et terribles "Si on avait su qu'un boche c'était rien qu'un Français qui parle allemand, on aurait eu du mal à continuer à leur tirer dessus.", et cette "der des der" qui n'en n'est pas une.

Cet amour fou est devenu quasi mythique dans les tranchées. Les hommes et les femmes qui ont croisé les deux amants en ont gardé un souvenir fort, car c'était l'étincelle de vie qui les faisait tenir.

Cette quête nous fait vibrer : les deux amants ont-ils réussi à se retrouver ? Ont-ils disparu ensemble pour enfin vivre sereinement leur histoire d'amour ? 

J'ai fini la lecture en apnée.

Une histoire prenante pleine d'amour sur fond de guerre (qui m'a fait penser à "Un long dimanche de fiançailles"), et une belle écriture. J'ai souri, j'ai tremblé, j'ai été épouvantée, j'ai espéré ...

Extrait : "Dans les tranchées, dans les boyaux, on remettait nos havresacs. Somme, Artois, Marne, Verdun. On démarrait, on avançait. On obéissait. Devant nous des havresacs, derrière nous des havresacs. Des voitures, des camions pour lesquels on s'écartait. On dégageait la route en se calant dans les fossés, en montant sur les parapets. On en profitait pour s'asseoir une minute ou deux. Quand il pleuvait, on n'osait pas toujours, pas au début en tout cas. A la longue, on s'en foutait, on remettait nos havresacs. Boue par boue, pluie par pluie, il fallait avancer.

On se racontait nos amours. Ceux qu'en avaient plus se souvenaient. Ceux qu'avaient pas été gâtés embelissaient. Ça sert à ça, les histoires, à rendre la vie meilleure. On avait les pieds lourds, alors on s'interdisait d'avoir le coeur trop lourd. On ne pouvait pas ajouter les larmes à la pluie, on aurait coulé. Et il fallait avancer. On remettait nos havresacs qu'on remplissait d'histoires d'amour d'un peu tout le monde, ça resservirait toujours. L'amour, ça se partage bien, t'en prend un bout, il en reste autant à celui qui t'a raconté l'histoire. C'était facile d'être généreux. Et pour cela, celui qui était le meilleur, d'après tous ceux qui l'avaient rencontré, c'était Joplain. Son histoire surpassait toutes les autres. Macaret, Létoile, Moriceau, tous en parlaient avec des lumières plein les yeux."

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La nuit est mon jour préféré, de Cécile Ladjali

La nuit est mon jour préféré

Livre qui tournait dans mon groupe de lecture et qui m'a attiré par son titre, sa couverture et le fait qu'il se situait à Tel Aviv, là où vit actuellement un de mes enfants.

Un roman d'introspection de Tom, jeune psychiatre dans un hôpital de Tel Aviv, qui doit gérer à la fois ses patients et sa vie personnelle chaotique.

Les deux patients que l'on va le plus suivre sont Hephraïm Steiner, un harpiste octogénaire hospitalisé pour paranoïa, et Roshan, une jeune fille palestinienne qui a tenté de se suicider après un déni de grossesse de près de 8 mois. 

Parallèlement à leur suivi, Tom revient sur son enfance, l'absence de son père, les relations difficiles avec sa mère et le drame qui s'est joué quelques jours avant sa naissance avec la mort de sa tante. 

Et tout cela sur fond de conflit israélo-palestinien ce qui donne une ambiance assez pesante.

Je me suis perdue dans les méandres des pensées de Tom et ses errements.  Pourtant j'ai bien aimé le début mais petit à petit j'ai eu l'impression de lire en boucle le même propos, notamment avec l'histoire de la tante de Tom et son amoureux de jeunesse.

Je suis donc resté en retrait et j'ai fini le livre en diagonale. Tant pis ! 

 

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Le plongeon de Séverine Vidal et Victor L. Pinel

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Le plongeon 2

Yvonne vend sa maison pour se rendre à l'EPHAD. Elle quitte avec une grande tristesse ce lieu où elle a vécu avec son mari et ses enfants. Dotée d'un franc parler, elle va rencontrer un groupe d'amis qui vont l'aider à mieux accepter cette institution.

Ah, comme j'ai aimé Yvonne, la tempétueuse qui, après un passage à vide, fait des soirées dans sa chambre, aime et fugue. Mais j'ai aimé aussi ses amis, qui ont tous leurs failles et un côté attachant, sans oublier Youssef l'aide soignant au grand coeur, attentionné et prévenant. 

Mais tout n'est pas rose dans cet EPHAD où le quotidien est rythmé par le manque de personnel, la climatisation en panne ou une directrice à cheval sur le règlement qui a tendance à infantiliser les résidents. 

Une très belle BD ou les dessins vont parfaitement avec le scénario. Les visages sont expressifs et permettent la compréhension des sentiments sans qu'ils ne soient écrits. On passe des larmes au rire.

Une lecture pleine d'espoir et de vie.

Retrouvez toutes les BD de la semaine chez Moka.

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17 mai 2023

Carnet de bord du 10 au 16 mai 20203

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Le garçon de Marcus Malte

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Il n'a pas de nom, pas de famille. Quand sa mère meurt en 1908, il se retrouve seul, quelque part dans le sud de la France. Il a environ quatorze ans. A part sa mère, il n'a jamais parlé à un autre humain. Et les seuls qu'il a rencontrés c'est des braconniers et un colporteur qui s'était arrêté devant leur cabane. A moitié sauvage, il décide de partir.

Les rencontres qu'il va faire, avec quelques familles dans un hameau, avec un saltimbanque vivant dans sa roulotte ou avec une jeune femme qui va l'aimer comme une mère, une soeur ou un amante vont le construire. Il découvre l'accueil et la peur de l'étranger, l'intolérance, la religion et l'amitié. Il imite, il s'imprègne de philosophie ou d'amour.

Mais en 1914, la guerre vient tout basculer dans l'horreur.

C'est un livre puissant et émouvant. Dès le départ, le ton est donné avec ce jeune garçon qui porte sa mère mourante sur son dos. - magnifique passage. J'ai aussi aimé la rencontre avec l'Ogre des Carpathes et leurs échanges ou silences plein de philosophie. J'ai été touchée par les relations avec les camarades de tranchées et par la description de la boucherie de cette guerre. Par contre j'ai trouvé des longueurs dans la vie avec Emma même si son ouverture aux arts est enchanteur.

Une écriture poétique et puissante qui retrace l'ouverture d'un innocent à la beauté et à l'horreur de la civilisation.

Extrait : "Il a franchi la frontière de son domaine. En ces territoires inconnus où il s'aventure il peut aussi bien être le chasseur que la proie. ll avance les sens à l'affût. L'ennemi est d'autant plus effrayant qu'il en ignore la nature. Il ne sait pas de quoi il doit avoir peur.Chaque bruit, chaque silence est jaugé dans l'immédiat pour la menace qu'il recèle. Chaque mouvement esquissé dans son champ de vision. En réalité, c'est à son instinct plus qu'à son jugement que le garçon s'en remet. Qui lui dicte sa conduite, l'incite à s'arrêter, à se tapir, à attendre ou à fuir. Dans l'ombre du prochain bosquet respire peut-être la créature qui va le dévorer."

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No-no-yuri et Suzuran de Aki Shimazaki

no no yuri   suzuran

J'ai commencé cette série par le titre Sémi, où l'auteur nous parlent d'un couple de personnes agées qui vivent dans une maison de retraite et dont la femme perd la mémoire au point de ne plus reconnaître son mari. Celui-ci va alors devoir la reconquérir. 

 

Dans No-no-yuri (le premier édité) l'histoire est centrée sur la fille aînée de ce couple, une femme de 35 ans très belle, célibataire, croqueuse d'homme, secrétaire de direction dans un grand groupe à Tokyo et très attachée à son indépendance.

On la suit dans ses relations avec des hommes mariés, son travail qui lui permet de voyager, ses rapports éloignés avec ses parents et sa petite soeur et son évolution face à une situation imprévue.

Cette jeune femme assez froide n'est pas très agréable et je n'ai pas ressenti beaucoup d'empathie à son égard. Le plaisir de la lecture vient non pas de ce personnage mais de la douceur de l'écriture qui arrive à nous transmettre l'ambiguité de cette femme, ce grand écart entre tradition et modernité et surtout le poids de souvenirs de son enfance qui l'ont fait devenir ce qu'elle est aujourd'hui.

 

Dans Suzuran on suit la petite soeur qui vit plus près de ses parents. Divorcée avec un enfant, elle est céramiste et commence à être reconnue dans le métier. Beaucoup plus douce et calme, elle est à l'opposée de sa soeur. Un volume plus tourné vers l'art, où l'on retrouve les sujets de choix de vie et de dualité présents dans les autres volumes.

 

J'ai aimé retrouver cette famille, ces caractères si différents et complémentaires. J'ai aimé l'idée que l'on voit leurs vies de plusieurs points de vue, chaque roman s'imbriquant dans le précédent.

Des courts romans très agréables à lire pour ceux qui aiment l'univers japonais.

 

J'ai hâte de poursuivre avec Niré, qui se concentre sur le petit frère, assez absent des autres ouvrages.

Extraits : 

No-no-yuri : "Tous mes amants étaient mariés, mais je n'ai jamais souhaité qu'ils divorcent pour moi. Au contraire, je les quittais dès qu'ils y faisaient allusion, comme O. Ce soir. Cela ne changera pas. Je cherche des hommes satisfaits de leur mariage."

Suzuran "La poterie est indispensable à ma vie. En pétrissant de l’argile avec mes mains puis en façonnant une pièce, j’oublie tout ce qui se passe autour de moi. Et, chaque fois, au moment de sortir mes oeuvres du kama, je suis à la fois très excitée et soulagée comme après un accouchement. Emue par les motifs créés au hasard par le feu de bois, je mûris déjà un nouveau projet."

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10 mai 2023

Carnet de bord du 03 au 09 mai 2023

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Spirou, l'espoir malgré tout de Emile Bravo

 

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LA bd de la semaine guerre (2)Dans le cadre de la BD de la semaine, le 10 mai est consacré à des BD reprenant le thème de la seconde guerre mondiale.

Ayant visité pendant mes vacances les camps d'Auschwitz et de Birkenau, et m'apprêtant à aller avec les élèves de 3e au mémorial de Caen et au cimetière américain, je suis bien imprégnée de cette période de l'histoire et du devoir de mémoire.

 

Et voici, pour prolonger cette transmission, une série de quatre très belles bandes-dessinées qui présentent Spirou, Fantasio et Spip dans les moments tourmentés de la seconde guerre mondiale.

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Spirou est un jeune groom de l’Hôtel Moustic quand la guerre éclate et que, dès mai 40, la Belgique est envahie. Son ami Fantasio se rêve journaliste. Tous deux vont se retrouver dans la ville de Bruxelles meurtrie et vont devoir faire des choix :  résistance, collaboration ou juste indifférence ? Les deux amis sont jeunes, perdus, désorientés et ne vont pas toujours prendre la même orientation.

Emile Bravo reprend le personnage de Spirou en le modernisant mais en gardant ses caractéristiques principales d'intégrité et de pacifisme. Il va intégrer dans ses BD des faits réels : bien sûr la guerre et la Shoah, mais aussi un théâtre ambulant, "le petit farfadet", qui a été créé pendant la guerre par le directeur du Journal de Spirou, comme outil de résistance. Là, c'est Spirou et Fantasio qui l'animent. Il y aussi la rencontre avec Felix Nussbaum, peintre juif allemand réfugié en Belgique, et sa femme Felka Platek, artiste elle aussi. 

 

 

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Beaucoup de sincérité dans ces personnages qui hésitent, ne savent pas quel chemin prendre dans ce contexte de guerre, en essayant de rester fidèle à des valeurs d'entraide. L'ambiguïté entre la relative naïveté des personnages et la noirceur de l'époque est très bien rendue. Une pointe d'humour vient soulager de temps en temps un sujet difficile.

Pour ce qui est des illustrations, c'est fluide, un trait précis avec des arrières plans fouillés ce qui permet de donner de la profondeur aux dessins.

Un beau coup de coeur ❤️ pour cette série qui mélange Histoire, réflexions, humanité, actions, romance et émotion. 

A lire.

L'exposition "Spirou dans la tourmente de la Shoah" se déroule au Mémorial de la Shoah à Paris jusqu'au 30 août 2023. Si je passe par là avant fin août, j'irais sûrement la voir.

Vous pouvez retrouver toutes les BD de la semaine chez Moka.

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Cent millions d'années et un jour, de Jean-Baptiste Andrea

cent millions d'années et un jour

Comment réussir à faire d'une quête paléontologique un thriller attachant ? Pari réussi avec ce roman.

Stan est paléontologue. Passionné par les fossiles depuis son enfance, il est, à la cinquantaine, plutôt enfermé dans des bureaux poussiéreux.

Il surprend un jour une conversation entre enfants, qui discutent d'un squelette de dragon enfermé dans une grotte de glace entre France et Italie, dont le gardien de l'immeuble leur avait parlé. Déterminé à retrouver ce géant qu'il imagine être plutôt un squelette de dinosaure préservé, il entraîne à l'été 54 dans son expédition Umberto un ami de longue date qui a été un temps son apprenti, Peter, un jeune scientifique qui travaille avec Umberto et un guide de haute montagne.

Sur ce glacier perdu, ils n'ont que quelques mois pour trouver le squelette qui changera leur destinée, avant le retour de l'automne et de la neige.

Dans cette quête d'un rêve d'enfant, il y a de l'amitié, de la ténacité et du dépassement de soi. La situation en vase clos où se retrouve ces 4 hommes conduit aussi à l'introspection et les souvenirs remontent entre un père taiseux et violent et une mère pleine d'idéal.

Le tout porté par une écriture simple et poétique.

Alors on y croit avec eux, on cherche, on s'enthousiasme, on est désenchanté, on tremble, on espère.

Une très belle lecture.

Extraits :  

"Allongé sur mon sac de couchage sous une bande d'étoiles. Premier jour d'une expedition qui en comptera dix ou cent, impossible à dire. Une pierre me rentre dans l'épaule. Je ne peux pas bouger, mon corps et trop las. Mes nouvelles jambes sont sagement rangées sous ma taille - je ne voudrais pas les user trop vite. Derrière l'horizon, un dragon tend son coup immense et mugit dans la nuit. Je t'attends. Mes yeux se ferment dans un parfum d'immortelles, une fragrance de mariées et de vieilles, d'éternel recommencement.

Bientôt."

 

"Deux jours que j'agresse la glace, le visage fouetté d'étincelles froides à chaque impact de la pioche ou du piolet. Deux jours que mon corps résonne, que mes tendons se filent, que mes os s'effritent. Mes muscles brûlent, chantent, se ramassent. S'étirent soudain et se retiennent les uns les autres pour ne pas céder, pour lever de nouveau l'outil, frapper encore. Je laisse un peu de moi à chaque coup."

 

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