Les braises, de Marai Sandor
Je vais vous parler d'un petit chef d'oeuvre lu récemment et qu'il ne faut pas "louper".
Écrivain interdit en Hongrie jusqu'en 1990, Sándor Márai écrit un livre de toute beauté, émouvant, sobre et bouleversant. On y découvre la blessure profonde et muette laissée par l'amour impossible, l'incommunicabilité, le poids du passé et le temps perdu.
Tout est suggéré dans chaque phrase, aucune violence apparente, aucun éclat mais une tension presque palpable. L'écriture est superbe.
Henri et Conrad, deux vieillards se retrouvent dans un face à face brûlant. Ce sont deux amis d'enfance, jusqu'à ce que la passion pour une même femme les sépare. Pendant que l'un méditait sa vengeance en silence, l'autre a purgé sa pénitence à l'autre bout du monde. Henri a préparé ces retrouvailles en veillant à ce qu'elle est lieu dans la salle de leur dernière rencontre, les détails rappelant le dîner qui précéda leur séparation. Ils vont s'affronter, dire enfin tout ce qu'ils avaient sur le coeur pendant toutes ces années. Sándor Márai nous livre un dialogue sobre et bouleversant.
A lire absolument.
Extrait : « Être différent de ce que l’on est…est le désir le plus néfaste qui puisse brûler dans le cœur des hommes. Car la vie n’est supportable qu’à condition de se résigner à n’être que ce que nous sommes à notre sens et à celui du monde. Nous devons nous contenter d’être tels que nous sommes et nous devons aussi savoir qu’une fois admis cela, la vie ne nous couvrira pas de louanges pour autant. Si, après en avoir pris conscience, nous supportons d’être vaniteux ou égoïstes, d’être chauves ou obèses, on n’épinglera pas de décoration sur notre poitrine. Non, nous devons nous pénétrer de l’idée que nous ne recevons de la vie ni récompense, ni félicitations. Il faut se résigner, voilà tout le grand secret. …/… [Nous résigner] à notre caractère et à notre nature dont les défauts, tels que l’égoïsme et l’avidité, ne peuvent être corrigés, ni par l’expérience, ni par l’intelligence. Nous devons admettre que des personnes que nous aimons ne correspondent pas à notre amour comme nous l’espérions. Nous devons supporter la trahison et l’infidélité. Nous devons aussi – ce qui est le plus difficile – savoir admettre que d’autres nous surpassent par leur caractère et leur intelligence. »
Vous pouvez retrouver l'avis aussi enthousiaste d'Hervé, Chimère,