Dans la tête de Shéhérazade, de Janicot Stéphanie
Parution 06/2008 – 310 p
Shéhérazade a 30 ans. Née à Paris de parents marocains, elle a eu « la chance » d’être élevée par un père aimant, présent et ouvert, qui l’a poussée à faire des études. Elle est devenue journaliste à la télévision, animatrice d’une émission de fin de soirée. A l’occasion de la préparation d’une de ses émissions, elle replonge dans l’année de ses 15 ans.
Rentrée au lycée Louis le Grand ou une section internationale arabe a été ouverte. Elle est un peu perdue dans cet environnement ou elle fait office, selon elle, « d’Arabe de service ». Elle est en décalage par rapport à ses cousins qui vivent dans un HLM de banlieue et sont déscolarisés. Ni tout à fait française, ni tout à fait marocaine, elle se cherche et à du mal à se situer. Trois ami(e)s vont l’aider, trois jeunes venant d’un milieu aisé mais eux aussi en quête d’eux-mêmes…
Amitié, double culture, rapports familiaux : beaucoup de thèmes sont abordés dans ce roman bien vu. Je n’ai pas trop accroché à la fin un peu trop « nian-nian », mais j’ai aimé l’histoire de cette jeune femme que l’adolescence tiraillée entre deux cultures a rendu peu sûre d’elle, malgré son succès.
Extrait : « Vous ne m’avez jamais maltraitée, non, mais depuis ce jour de rentrée, je suis restée l’alibi, l’Arabe de service, la bonne conscience d’une société qui, par ailleurs, parque ses immigrés dans des ghettos. A Sciences po, de même. Il paraît qu’aujourd’hui la population y est plus métissée. Bon. Moi, j’y étais encore la Maghrébine méritante. Indulgence des professeurs. Comme si je n’étais pas née dans la même clinique que la plupart d’entre vous. Comme si je n’avais pas bâti mes pâtés de sable au jardin du Luxembourg. J’étais perdue, car nulle part je ne pouvais me sentir chez moi. Aucun groupe ne pouvait être le mien. Karim ou Jamaldin ont partagé leur enfance avec toute une génération. Ils sont des milliers de Karim ou de Jamaldin. Certains s’en sont sortis, d’autres pas. Mais ils savent à quelle communauté ils appartiennent. Car vous avez fait d’eux les enfants d’une communauté. Vous les avez renvoyés à leurs semblables. Même de moi, qui pourtant était vous, vous avez fait quelqu’un de différent. »