Muette, de Pessan Eric

 parution 05/2013 - 210 p.

Un livre qui était sur ma LAL depuis fort longtemps.

Nous allons suivre la fugue de Muette, une jeune lycéenne qui n'en peut plus. Rejetée par ses parents depuis sa naissance non attendue (sa mère était en seconde), rabaissée continuellement, déconsidérée par sa famille, méprisée et humiliée elle parait transparente, et donc muette.

Elle décide de quitter sa maison et d'aller se réfugier à quelques kilomètres dans une grange délabrée où elle a l'habitude de se rendre.

Seule dans cet endroit, elle revient sur sa vie, sur les petites phrases qui l'ont parsemées "Tu ne comprends rien à rien, ma petite fille", "elle finira comme sa mère celle-là, elle n'est pas dégourdie" "tu es folle, vraiment folle" "à croire que tu le fais exprès pour nous faire du soucis" "menteuse"...

C'est avec toute cette non-attention, cette déconsidération que Muette s'est construit. Alors elle abhorre les être humains et espère trouver dans cette fugue le calme d'une vie en osmose avec la nature. Mais il n'est pas si facile de vivre en autarcie.

Muette est une enfant hypersensible, en pleine adolescence : est ce que ce mal de vivre est dû à son émotivité ou est ce que ses parents sont effectivement ces êtres abjectes qui l'enfoncent ?

Un livre dont j'ai aimé la construction : le monologue de la jeune fille ponctué par les phrases assassines de sa mère. Et même si j'y ai trouvé quelques petites longueurs, c'est un roman qui me restera en mémoire.

Extrait : "Et il pleut, et la pluie ne cesse de tomber du ciel comme si elle devait laver toutes les histoires, comme si elle devait les emporter dans son flot. Comme si elle était la seule vérité, celle de l'eau qui transforme la terre en boue et noie les mensonges, recouvre les paroles et ne laisse rien émerger d'autre que les hommes mis à nue. Muette se souvient du titre du film et du nom du réalisateur, elle ne se souvient plus - par contre - si une histoire est plus crédible qu'une autre ; elle ne sait plus si l'un des récits est donné comme vrai. Elle ne garde en mémoire que l'idée du doute ; il est parfois impossible de savoir vraiment, surtout lorsque seules s'affrontent des paroles.

Muette avait beaucoup aimé ce film et elle sent qu'elle ne pourrait plus le revoir aujourd'hui. Muette a besoin d'une vérité unique, elle n'a que faire des hypothèses, elle a besoin d'un seul et inaltérable chemin,

ne raconte pas n'importe quoi !

Lorsque les hommes mentent, c'est parole contre parole et les plus faibles ont tort."

Comments

[Valérie]

On avait pas mal parler de ce roman à sa sortie. IL me semble que l'auteur en sort un nouveau en janvier.

[Alex mot a mots]

Pas certaine d'avoir envie de lire des phrases assassines de mère....

[Sylire]

Il a tourné dans mon comité de lecture, mais je suis passée au travers. Qui sait, peut-être va t'il croiser ma route dans une bouquinerie quelconque ?

[luocine]

C'est désespérant ces phrases qui assassinent les enfants et on le sait depuis toujours, mais ça continue encore et encore.