Quand le père revient après sept ans d'absence, le fils a du mal à le reconnaître. Il faut dire qu'il avait juste deux ans au moment de sa disparition. C'est un homme "insondable, irascible, dévoré". Le couple se reforme et le père, pour tenter un renouveau, montrer qu'il a changé, emmène sa femme et son fils aux Roches. C'est un endroit perdu dans la montagne, difficile d'accès, une masure délabrée, loin de tout ou le père a passé une partie de son enfance.
Au milieu du quotidien de ce trio dans ce lieu perdu, des chapitres reviennent sur l'enfance de la mère et du père et sur leur rencontre.
La psychologie des personnages est parfaitement exposée, entre un homme au comportement erratique et menaçant qui est obsédé par un lieu ou il a vécu une enfance solitaire après un deuil, et une femme désabusée et craintive qui espère toujours que cela va s'arranger.
Une angoisse sourde monte petit à petit avec l'intuition d'un malheur à venir.
Un roman noir très bien mené, avec une narration à la troisième personne adoptant la voix de l'enfant. La montagne est elle-même un personnage, et mon seul bémol vient de la description très détaillée de la nature.
Une histoire rude qui reste en mémoire.
Extrait : "La mère lève le regard vers lui, dans le rétroviseur. Il ressent dans son demi-sommeil le baume familier de ses yeux bruns posés sur lui. Souvent, il s'est allongé dans le lit de la mère, tous deux se faisant face en chien de fusil, leur tête sur un bras replié, et dans la fraîcheur de la chambre embrasée par la lumière il a contemplé le visage de la mère, les yeux de la mère, empreints de quelque chose d'indicible, d'une tristesse infinie ou d'une résignation, comme si elle se trouvait face à lui, son fils, désemparée et coupable."