Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
le blog des fanas de livres
le blog des fanas de livres
  • Je lis pour m'évader, avancer, ressentir des émotions et des sensations, rire, vibrer, pleurer, comprendre, m'ouvrir à de nouvelles cultures, rêver, trembler... et j'ai bien envie de le partager avec vous.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
26 juin 2024

Cris de Laurent Gaudé

Je me suis inscrite chez Géraldine au challenge « Lisez votre chouchou », en choisissant mon auteur culte : Laurent Gaudé.

 

Voici ma deuxième lecture du challenge. Cris est un court récit qui se passe dans les tranchées lors de la première guerre mondiale. Roman paru en 2001.

 

 

Quel texte ! Il y a des passages que j'ai lu à voix haute rien que pour le plaisir d'écouter la musique de l'écriture. Et pourtant, qu'il est dur ce roman.

 

 

Ils sont plusieurs à parler : Jules qui a quelques jours de permission, et qui laisse derrière lui ses deux copains Marius et Boris. Et la compagnie du lieutenant Rénier qui va monter au front pour la première fois avec Ripoli, Dermoncourt, Castellac, Barboni et Messard.

 

 

Nous sommes dans la tête de chacun, dans ses pensées, dans la description de ce qu'il voit, entend, sent, touche.

 

 

Nous suivons les ordres aberrants, les avancées et retraites, les éclats d'obus, les sifflements, les corps qui tombent, la boue, le froid, la peur et la folie.

 

 

Il y a le cri de celui qui doit partir au combat et tuer, celui du blessé, celui de l'homme que la guerre a rendu fou et il y a aussi la terre qui hurle. Plus loin, il y aura le cri de la mère qui ne verra pas revenir ses fils, ou celui du permissionnaire qui est si décalé face à la vie qui continue à l'arrière.

 

 

Des phrases courtes, un texte puissant qui prend aux tripes.

 

 

Extraits :

« Le sifflement dans mes oreilles. Ne pas s'inquiéter. Tous sourds. Oui. Les rescapés. Tous ceux qui ont survécu aux douze dernières heures doivent être sourds à présent. Une petite armée en déroute qui se parle par gestes et crie sans se comprendre. Une petite armée qui n'entend plus le bruit des obus. Une petite armée d'hallucinés qui n'a plus peur et ne sait plus dormir. Et donc les hommes restent, tête droite, regard écarquillé en plein milieu du front. Nous sommes une armée de sourds éparpillés. C'est tout ce qui reste de nous. Ils avaient prévu que cela se passerait autrement. Une grande offensive. C'est cela qui était programmé. Reprendre l'initiative. Enfoncer les lignes ennemies. Une grande attaque. J'y ai cru moi aussi, quand j'ai vu, à droite et à gauche, tous ces types se lever en même temps que moi. J'y ai cru parce que je n'en avais jamais vu autant. Je me suis dit que là, il mettait le paquet que, là enfin, ils se décidaient à percer les lignes d'en face. Oui, mais maintenant c'est fini. Tout ce qui reste, ce sont des bourdonnements dans l'oreille des rescapés. Et on peut dire que la grande attaque, c'est ceux d'en face qui l'ont faite. Un kilomètre. Ils nous ont mangé un kilomètre. »

 

 

« Les obus grêlent. Mais pour nous, c'est l'heure des couteaux. Nous vissons nos baïonnettes au bout de nos canons. C'est l'heure du corps à corps. Aux hommes désormais de participer au carnage. Que le sang coule. Au couteau. Ouvrir les chairs. Creuser les viscères. Pas un seul d'entre nous n'est fait pour cela. Pas un seul d'entre nous ne sait quelle bête il faut être pour saisir à bras-le-corps un ennemi et plonger entre ses côtes une lame épaisse. Il faudra faire face à la charge. Je voudrais hurler que l'on ne peut pas nous demander cela. Qu'il y a là quelque chose de trop. Je voudrais hurler mais les explosions couvriraient mes cris. Alors je me tais. Je serre les dents et mon fusil. »

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité