Alors c’est bien de Clémentine Mélois

L’autrice revient sur les derniers instants et l’enterrement de son père, un sculpteur fantasque qui est mort en juin 2023 à l’âge de 84 ans. 

On plonge dans les souvenirs d’une enfance baignée dans l’art avec la sortie familiale dans des décharges pour récupérer des objets émaillés, les ateliers bricolages à la sortie de la classe mais aussi le début de la notoriété qui va permettre à son père de vivre de son art.

A côté des souvenirs, il y a la réalité d’un père en fin de vie dont les forces s’amenuisent. Mais même dans ses derniers instants, le sculpteur reste plein d’humour et de poésie. 

Et son enterrement sera comme lui, hors norme. Un cercueil repeint en bleu, des objets de son quotidien posés près du corps, une croix émaillée … 

Le livre est traversé par la voix du père de l’autrice, à travers ce qu’il a dit et ce qu’il a écrit dans des carnets que sa fille a trouvé après son décès.

Un bel hommage tendre, lumineux et émouvant d’une fille à son père. Un beau livre sur le deuil vu d'une façon singulière.

Extrait : “Sur une pierre dans l’encadrement de la porte, Papa avait gravé en lettres capitales : “Ici l’on vit heureux”, et ce bonheur se sent sur les photos en noir et blanc et les images saccadées des films en super-huit. Il y avait un âne, un chien, des chats et une chèvre. Le linge séchait sur le fil barbelé du pré d’en face. Un bœuf , un jour, avait ruminé un t-shirt, ressorti troué comme une passoire. L’âne Basile avait volé par la fenêtre le pantalon de mon père, qui avait dû la poursuivre en slip à travers le jardin. Des tableaux, des sculptures et des objets astucieux occupaient déjà tout l’espace : un gros œil motorisé qui regardait autour de lui; une bicyclette enceinte d’un tout petit vélo ; une chèvre en plâtre ; une femme nue avec une tête en crâne de chat, qui ouvrait et refermait son manteau quand on pressait un interrupteur ; un Christ en croix dont les bras ballants pouvaient être remontés en tirant sur une ficelle ; une sculpture d’araignée aux pattes de trois mètres de haut, entre lesquelles Barbara faisait du tricycle ; et aussi un cheval à roulettes ancien. C’est ce cheval qui avait permis à Papa de gagner l’estime de son beau-père, bricoleur de génie, comme lui. Il l’avait trouvé en morceaux au tas d’ordures, et l’avait reconstitué comme un puzzle. L’artiste, incapable de couper du bois et de saigner le cochon était peut-être fréquentable.”

Comments

[Anne-yes]

J'ai découvert Clémentine Mélois avec ses détournements de romans-photos ou pochettes de disque. C'est très drôle, je recommande. je comprends bien que ce livre est d'un tout autre genre mais m'intéresse aussi.

[luocine]

est ce que l'oiseau que tu as mis à la fin de ton billet est une oeuvre du sculpteur ?

[gambadou]

@ Luocine : oui, tout à fait. J'aurais dû mettre une légende.

[Violette]

Je l'ai vue à la Grande Librairie et j'ai trouvé beaucoup de points communs avec ma relation avec mon papa décédé en 2019, pour cette raison, je ne suis pas sûre de vouloir le lire ce livre... :/

[gambadou]

@ Violette : je comprends