Terre des affranchis, de Lazar Liliana
Parution 09/2009 – 197 p.
Premier roman d’une écrivain née en 1972 en Moldavie roumaine et arrivée en France en 1996. Je l’ai découvert grâce au prix de "l’algue d’or" décerné par la librairie de notre petit village de vacances à un livre francophone.
Nous sommes en 1965 à Slobozia, petit village perdu de Roumanie. Nicolae Ceausescu vient d’arriver au pouvoir et la répression contre la religion va commencer à se faire de plus en plus forte. Victor Luca, jeune bûcheron, n’arrive pas à contrôler ses pulsions et tue une jeune fille. Le prêtre du village, mis au courant, va lui demander, comme rédemption, de se cacher et de recopier sur des cahiers d’écoliers des textes religieux qui seront ensuite distribués "sous le manteau".
Mais une vie de reclus au service de la religion suffit-elle pour se faire pardonner ses péchés ? Les pulsions meurtrières de Victor seront-elles annihilés par sa foi ? et quand un étranger vient se faire ermite dans la forêt avoisinante, est-ce contre lui ou contre l’enfant du pays que les villageois vont se tourner ?
Une rétrospective dure et puissante de la vie en Roumanie à cette époque, : silence, compromission, village reclus, suspicion, pauvreté, rudesse des paysages et de la météo …. Un panorama qui montre un pays désireux d’ouverture mais replié sur ses peurs. Extrait : "Après la Révolution, la vie à Slobozia changea peu. La pauvreté lancinante de cette campagne moldave faisait peser une chape de plomb que plusieurs décennies ne suffiraient pas à faire disparaître. Chacun continua à vivre de l’agriculture, de l’élevage et de la coupe du bois. Avec le passage à l’économie de marché, la seule entreprise du village à se créer après la Révolution fut d’ailleurs une scierie qui réemploya les cinquante bûcherons de l’ancien kolkhoze forestier. Au milieu de la grande forêt des Carpates, le village semblait comme perdu. Une seule route permettait d’y accéder. Après une vingtaine de kilomètres d’asphalte, une piste de terre battue prenait le relais sur encore quinze kilomètres. En été, les véhicules disparaissaient dans les nuages de poussière que soulevait leur passage. En automne, avec les premières pluies, la route se transformait en bourbier dans lequel les roues des camions chargés de bois s’enlisaient. Chaque année, des accidents spectaculaires défrayaient la chronique."