Les Fleurs d'hiver, de Villeneuve Angélique
Acheté après avoir vu de nombreux coups de coeur sur les blogs.
Jeanne est ouvrière fleuriste à domicile. Elle vit à Paris dans une chambre avec sa petite fille, Léonie. Celle-ci n'avait que 6 mois quand son père est partit à la guerre, après la mobilisation d'août 1914.
Fin décembre 1916, Jeanne apprend que son mari, Toussaint, a été blessé et est hospitalisé au Val de Grâce à Paris. Mais juste au moment où elle allait le voir elle reçoit un message de lui disant "Je veux que tu viennes pas". Ces mots sont une déchirure, une blessure.
Au bout d'un an et demi, le père de Toussaint est allé au Val de Grâce voir son fils. Au Ve Blessés, sont regroupés les blessés de la face. "Alors quoi. Alors oui, il était un peu changé, abîmé, c'est sûr, mais quand même, à côté des autres bougres qu'il avait vus là-bas, ça n'était rien du tout."
C'est tout ce que Jeanne a comme nouvelle. Ça plus toutes les lettres qu'elle et Toussaint échangent. Alors quand il revient subitement au début de l'hiver 1918, il faut qu'ils apprennent à se réappriovoiser. Toussaint porte un bandage sur la joue, ne parle pas, dort dans la journée. Jeanne aimerait qu'ils échangent sur ce qui s'est passé, qu'il lui fasse confiance ... jusqu'à ce qu'elle se rende compte que ce qu'il a vécu n'est pas racontable, qu'il ne pourra parler qu'à ceux qui ont connu la même chose.
Une écriture poétique et ciselée qui m'a donné plus d'une fois envie de relire un passage. Une évocation très bien documentée de la vie à l'arrière pendant la guerre, des réparations de la face qui ont beaucoup évolué à cette époque, de la détresse psychologique des soldats ayant connu le front, de la solitude et du chagrin des mères qui ont perdu un ou plusieurs enfants.
Le tout distillé dans une histoire d'amour simple et belle.
J'ai très envie de continuer à découvrir cette auteure. Merci en tout cas à tou(te)s les bloggeurs/euses qui ont recommandé ce livre et m'ont donné envie de le lire (et merci à ma maman pour l'achat ;-)).
Extrait : "Je veux que tu viennes pas.
Ça ne sortait pas de sa tête. Et pourtant, certains jours, par miracle, la phrase d'interdiction finissait par s'adoucir en elle.
Elle se la disait à mi-voix, dans l'obscurité, la disait dix et douze et vingt fois, la figure noyée dans l'édredon de son lit.
Elle disait Je veux que tu, et lui apparaissaient des choses, des morceaux de lui sous les paupières à elle, des mouvements, des creux et des reliefs, son épaule, sa hanche qui roulait.
Je veux que tu et le long souffle d'homme reprenait naissance sur sa nuque, je veux et le corps de Toussaint noué au sien redevenait vivant."