Continuer, de Mauvignier Laurent
Sibylle se perd. Après son divorce, elle a quitté Paris pour aller vivre à Bordeaux avec son fils de 16 ans, Samuel. Elle ne s'occupe plus d'elle, traîne en vieille robe de chambre en fumant cigarette sur cigarette. Et pendant ce temps là, Samuel se perd aussi : copains skinhead, beuverie, notes qui chutent, jusqu'à l'incident de trop.
Alors Sybille décide de couper les ponts et de partir avec son fils dans un long voyage quasi initiatique, pour remettre son fils, et elle par la même occasion, sur des bons rails.
On part donc avec Sybille et Samuel au Kirghiztan, lointain pays de leurs ancêtres, pour une randonnée à cheval de quelques mois.
Il va en falloir du temps pour que les regards de haine de Samuel se muent en ce qui peut ressembler à de la complicité. Il est venu contre son grès (c'était ça ou la pension de Jésuites). Il est muré dans son silence, dans ses reproches et dans sa rancune. Il juge sa mère comme une incapable, relayant ainsi le regard du père sur son ex-femme. Il est toujours sur la défensive et sa mère ne sait pas quel angle d'approche utiliser, elle qui a perdu toute communication avec son fils.
Il y a les paysages sublimes, les rencontres avec des autochtones accueillants, la relation avec les chevaux mais aussi les galères du voyage, les peurs, les dangers de la route.
J'ai beaucoup aimé cette relation qui essaye de se nouer, la tension qui monte malgré des gestes de tendresse, cette exaspération palpable et cette envie de tout changer, les phases d'espoir et de doute qui se succèdent, la volonté farouche de Sybille qui se heurte à l'animosité de son fils.
Juste un tout petit bémol sur la fin que j'ai trouvé un peu trop rapide.
Une très belle lecture. Merci à Sylire de l'avoir proposé pour les matchs de la rentrée et à Price Minister pour l'envoi.
#MRL16 #PriceMinister
Extrait : "Et elle avait continué à dire qu'il fallait que Samuel comprenne des valeurs qui étaient les choses simples et essentielles, les autres, le respect des autres, écouter les autres, la simplicité de la lenteur, du contact avec la vie, qu'on balance ce putain de monde qui nous sépare les uns des autres et qu'on arrête de prendre pour inéluctable ce qui ne l'était que par notre passivité, notre docilité, notre résignation. Elle ne pouvait pas accepter de voir son fils sombrer dans la délinquance parce qu'il pensait que sa vie n'avait aucun sens ni aucune importance ; elle ne s'y résoudrait pas et avait compris ce qu'il fallait faire, parce qu'elle le voulait aussi pour elle, qu'elle avait besoin de reconstruire sa vie, la leur, redonner du sens à la vie, tout remodeler, dessiner une vie humaine dans un monde qui ne sait plus l'être."