Nos richesses de Kaouther Adimi
L'auteure revient sur la vie d'Edmond Charlot.
Né à Alger en 1915, Edmond Charlot devient libraire-éditeur en 1936 à vingt-et-un ans avec l'ouverture de sa petite librairie, « Les Vraies Richesses ».
A la fois librairie, bibliothèque de prêt, maison d’édition, galerie d’art (le premier peintre exposé est Bonnard), cette « boutique » exiguë de la rue Charras devint vite l’un des principaux point de ralliement et foyer culturel des jeunes intellectuels et écrivains en herbe algérois.
Il va éditer Albert Camus, Jules Roy, Emmanuel Roblès et Gabriel Audisio, mais aussi Gide ou García Lorca.
Pendant la guerre, alors qu'Alger est devenue capitale de la France libre, son activité d'éditeur se développe mais il doit faire face à une pénurie de matières premières. Il se démène avec passion et imprime sur du papier de boucherie en utilisant de l'encre de pépins de raisin.
En 1945, il ouvre une "succursale" à Paris. Toujours aussi enthousiaste et dynamique il obtient , en trois ans, deux prix Renaudot et un Fémina. Mais les grands éditeurs parisiens lui font de l'ombre, cherche à récupérer les auteurs avec des contrats plus alléchants. En 1950, privé de papier d'imprimerie et criblé de dettes, Charlot jette l'éponge et repart pour Alger.
Un roman passionnant. J'ai aimé le rythme apporté par le mélange entre les extraits de journal intime et l'histoire contemporaine d'un étudiant ayant pour mission de vider la librairie. C'est très intéressant de suivre cet homme passionné par les livres avec en toile de fond l'histoire de l'Algérie. J'aurais juste aimé en savoir un peu plus sur la vie personnelle de Charlot, vie qu'il a mise de côté pour s'occuper de son entreprise.
Un récit intéressant et poignant.
Extrait :
"3 Novembre 1938 :
Les Vraies Richesses fêtent leur anniversaire ! Nous avons survécu aux deux premières années, nous survivrons aux vingt prochaines ! Fierté en regardant mon fonds des éditions Charlot. Moins de fierté en faisant mes comptes. Ce travail m'oblige à délaisser Manon, ma famille, mes amis ... Mes journées sont consacrées à la lecture des manuscrits, à la comptabilité, aux nombreux déjeuners et dîners, aux passages dans les imprimeries, aux milliers d'obligations administratives. Tout cela m'épuise et me réjouit en même temps.
17 décembre 1938 :
Aujourd'hui encore, des clients intéressés uniquement par les derniers prix littéraires. J'ai essayé de leur faire découvrir de nouveaux auteurs, de les inciter à acheter L'Envers et l'Endroit de Camus, mais totale indifférence. Je parle littérature, ils répondent auteur à succès ! "