Les disparus, de Mendelsohn Daniel
parution 08/2007 -640 p - traduit de l'américain
Que dire de ce pavé, si ce n'est qu'il m'a touché et m'a fait réfléchir à la transmission de l'Histoire par nos "anciens".
Je l'ai rangé dans la catégorie "récit", car il s'agit d'une quête. Celle effectuée par Daniel Mendelsohn pour essayer de retrouver l'histoire d'un de ses oncles, tués avec sa famille lors de l'holocauste.
La famille de Daniel, juive pratiquante, s'est installée aux États Unis dans les années 30. Tous, sauf un oncle, l'aîné, resté au pays. Ce pays c'est un petit bout de terre coincé entre la Pologne et l'Ukraine. L'oncle y vit d'un commerce florissant de boucherie. Il est marié, il a 4 filles. Ils disparaîtront tous au cours de la guerre. Cela Daniel le sait. Mais il ne sait pas comment, pourquoi, que c'est-il passé exactement? "
Il va donc partir à la rencontre des survivants, ceux qui ont connu cette famille et qui s'en souviennent malgré les nombreuses années passées. Et ce qu'il cherche, au delà des dates, ce sont des anecdotes, des petites choses qui, misent bout à bout, rendront cette famille "vivante" et permettront de changer des faits bruts en histoire. "Lorsque vous êtes arrivés ici aujourd'hui, ma mère voulait se souvenir des dates. J'ai essayé de lui faire comprendre que les dates ne sont pas importantes, ce ne sont pas les dates, mais ce que c'était que d'être là, comment les choses se passaient, qui était mon grand-père - pas sa profession, mais sa personnalité. Elle n'arrive pas à comprendre que vous vouliez connaître des choses triviales, du genre à quoi ressemblait l'école, comment était les professeurs. C'est tellement difficile à expliquer."
Ce livre reprend sa quête, ses trouvailles, ses renoncements et ses voyages de New York à Israël en passant par l'Australie, Vienne aussi ou il visitera un cimetière juif quasiment vide "A coté de ces tombes (presque aucune d'entre elles, avons nous remarqué en y circulant, ne porte de dates postérieures au début des années 1930), se déployait une vaste prairie vide. Nous l'avons regardée fixement pendant un moment, avant de comprendre que la Nouvelle Section était en grande partie vide parce que tous les Juifs qui auraient dû être enterrés là, selon le cours normal des choses, étaient morts dans des circonstances qu'ils n'avaient pas prévues et s'ils avaient été enterrés, l'avaient été dans d'autres tombes moins élégantes qu'ils n'avaient pas choisies."
Au milieu de ces pages, il y a beaucoup de digressions avec des passages de la Torah qui sont expliqués et comparés avec l'histoire de la famille : la jalousie entre cette oncle "aîné" et ses frères mis en parallèle avec l'histoire d'Abel et Caïn...
C'est très intéressant, parfois un peu long. Il faut prendre son temps, y revenir. Je ne dirai pas que c'est un livre majeur (il a été élu meilleur livre de l'année par le magasine Lire), mais il nous permet de voir cette période de l'histoire avec un regard différent, plus humain. "il est plus naturel et plus attrayant pour des lecteurs de comprendre le sens d'un grand évènement historique à travers l'histoire d'une seule famille."
Malgré le fait qu'il est à son opposé, ce livre m'a rappelé "les Bienveillantes" de Jonathan Littel. Ce sont des livres qui font réfléchir, qui sont long à digérer et qui me resteront sans doute très longtemps en mémoire.
Ce livre m'a donné l'envie d'en savoir plus sur ma propre famille, avant que la génération qui a connu cette période de la guerre ne s'éteigne. J'ai donc rendez-vous dans 10 jours avec un frère de ma grand-mère, pour "l'interviewer"... A suivre....
Vous pouvez allez voir la très bonne (dans tous les sens du terme) critique de Lily, et de Sophie, Moustafette, Chaperlipopette, et le Bibliomane