Rencontre des Goncourts
Jeudi soir avait lieu, comme tous les ans, une rencontre entre le public et le lauréat du prix Goncourt Lycéen.
En plus, cette année, nous avions la chance d'avoir deux lauréats :
- Sorj Chalandon pour "le quatrième mur" - Prix Goncourt Lycéen
- Pierre Lemaitre pour "Au revoir là haut" - Prix Goncourt
était aussi de la partie deux académiciens : Paule Constant et Didier Decoin et deux lycéens.
Un échange riche et très intéressant. Paule Constant a élevé le débat en parlant de la force et la beauté de la littérature, Sorj Chalandon a apporté une pointe d'émotion en nous racontant les fantômes qui le hante à la suite de son métier de journaliste de guerre, Pierre Lemaitre a été plus facétieux, et les deux lycéens ont apporté un peu de fraîcheur dans les débats.
Voici très rapidement quelques échanges que j'ai retenu :
Deux livres, deux moments, un même thème : sortir de la guerre et faire la paix.
- Pierre Lemaitre : Je suis un romancier, pas un moraliste.Je pose des questions et c'est au lecteur de porter un jugement. Je propose une situation qui donne à réfléchir à deux choses : 1 - la sortie de la guerre 2 -une résonance avec aujourd'hui, avec les populations en situation d'exclusion comme les chômeurs ou les travailleurs pauvres qui sont déconnectés du monde commercial dans lequel nous vivons.
Sorj Chalandon : Je suis d'accord avec Pierre, nous ne sommes pas des moralistes. J'ai envie de partager des choses avec des gens. J'ai été touché personnellement par le métier de journaliste mais ce métier ne m'a pas permis de faire parler l'homme. Dans mes romans, ce n'est pas le journaliste qui parle, c'est l'homme qui s'est retrouvé dans des lieux où il a souffert. Le recul, la fiction, m'ont permis de résister à tout ça. Ça m'a permis de clore la guerre, de régler mes comptes avec la guerre. J'étais hanté par ces images du massacre de Sabra et Chatila. Ça ne m'a pas aidé à oublier, mais m'a permis de vivre avec. En sortant de la guerre je me sentais mal, sale. Après avoir écrit ce livre, je me sens propre.
Paule Constant : Je suis touchée par l'incroyable diversité de la création littéraire. C'est très intéressant de voir l'histoire de chaque roman décrit par l'écrivain. Il n'y a rien de plus différent que ces deux livres, celui qui a écrit à distance, et celui qui écrit à partir de la poche de chagrin qu'il a en lui. Et pourtant il y a tout en commun. C'est très beau. La littérature sert à mettre des mots sur nos joies, nos peines, sur ce que nous sommes.
Mot de la fin à Pierre Lemaitre : " Si le réel suffisait, la littérature n'existerait pas"