en-attendant-bojangles parution 01/2016 - 160 p.

J'ai été très étonnée par ce livre parce que je ne m'attendais pas du tout à ça ! 

- Des critiques que j'avais lues, j'avais retenu que c'était un livre enjoué et joyeux, ce qui me tentait beaucoup (ça change du marasme habituel) !

- La couverture sur fond jaune d'un couple en train de danser laisse penser que ce roman est léger et facile.

Et j'ai donc été assez désorientée, parce que j'ai trouvé ce livre plutôt dur et sombre, et en relisant les avis des uns et des autres, je n'ai pas l'impression d'avoir lu le même livre !

C'est l'histoire d'un couple qui vit dans une folie douce. Ils refusent la réalité et vivent hors des conventions, dans une gaieté extravagante. Ils vivent à quatre avec leur fils et un oiseau exotique surnommé Mademoiselle Superfétatoire. Leur fils en prend son parti, obligé de mentir en classe pour s'inventer une vie "normale", obligé de mentir chez lui pour inventer une journée plus intéressante que celle qu'il a vécu à l'école "Quand la réalité est banale et triste, inventez-moi une belle histoire, vous mentez si bien, ce serait dommage de nous en priver".

La mère a un caractère tempétueux et déluré. Le mari est fou amoureux de cette femme excentrique, qui peut aller faire ses courses toute nue et  qui organise des fêtes impromptues. Il lui invente tous les jours un nouveau prénom et se laisse porter par sa folie. Malheureusement, vivre en marge de la société de nos jours est difficile et la réalité va s'imposer. La folie magique de la mère se transforme petit à petit en crise de folie furieuse. Le côté farfelu devient schizophrénie, bipolarité, hystérie.

Le texte est écrit par le fils qui explique son enfance assez déroutante. Il a un regard extérieur touchant et tendre. Mais il y a aussi des magnifiques pages écrites par le père. On ressent alors tout l'amour qu'il porte pour sa femme et pour son originalité. Un amour fou qui peut être destructeur pour l'entourage.

Un livre qui sort de l'ordinaire, qui m'a décontenancé et que j'ai lu d'une traite. Décontenancée parce que j'ai toujours vu le côté négatif derrière l'humour et la folie lumineuse de la mère. Décontenancée parce que, comme dans le dernier livre de Sorj Chalandon, j'ai du mal à comprendre l'attitude d'un adulte consistant à fermer les yeux devant un comportement déviant sans penser d'abord à l'enfant. Décontenancée parce que je m'attendais à lire un livre plein d'humour et de lumière.

Un livre qui m'a mise mal à l'aise et qui me restera longtemps en mémoire. Un roman à la fois extravagant et bouleversant.

 

Extrait : "A l’école, rien ne s’était passé comme prévu, alors vraiment rien du tout, surtout pour moi. Lorsque je racontais ce qui se passait à la maison, la maîtresse ne me croyait pas et les autres élèves non plus, alors je mentais à l’envers. Il valait mieux faire comme ça pour l’intérêt général, et surtout pour le mien. A l’école, ma mère avait toujours le même prénom, Mademoiselle Superfétatoire n’existait plus, l’Ordure n’était pas sénateur, Mister Bojangles n’était qu’un bête disque qui tournait comme tous les disques, et comme tout le monde je mangeais à l’heure de tout le monde, c’était mieux ainsi. Je mentais à l’endroit chez moi et à l’envers à l’école, c’était compliqué pour moi, mais plus simple pour les autres."